l’interview, exhumé par l’INAa été diffusé dans le journal « 20 Heures » de la deuxième chaîne française fin juin 1970, quelques jours après le troisième sacre planétaire par Pelés Brésil. Tout droit sortie de son coiffeur, au milieu d’une nuée d’enfants, l’idole auriverde, décédé jeudi à l’âge de 82 ansIl assure contre toute évidence qu’il est « un homme comme les autres ».
« Tu es riche ? », ose un journaliste en portugais. « Je suis dans la santé et la gloire », répond le meilleur joueur de tous les temps, l’humiliation impeccable et un sourire en coin. Si seulement j’avais la moitié de l’argent qu’ils me prêtent, alors je serais un homme riche. »
50 ans plus tard journal espagnol El Mundo assuré que l’ancien enfant pauvre de Tres CoraçõesCireur de chaussures dans son enfance, à partir de 2020, il avait un héritage de 100 millions de dollars investi principalement dans l’immobilier. Entre les deux dates, Pelé est resté une légende. Il a été nommé ambassadeur auprès de l’ONU, de l’Unicef ou encore de l’UNESCO, et a été le premier ministre noir des sports de son pays de 1995 à 1998.
Le virage new-yorkais
Mais le King est également devenu un homme sandwich, engrangeant les partenariats lucratifs alors que Xavier Gravelaine a empilé les chauves-souris tout au long de sa carrière. « C’était une icône mondiale, donc il avait des aspirations énormes », note le sociologue du sport Michel Raspaud, auteur deHistoire du football au Brésil, édité par Chaneigne. Il a annoncé tout et tout le monde, à la fois pour la charité et pour les affaires. Quand il est allé au Cosmos à New York [en 1975], il était ambassadeur du Warner Communications Group, propriétaire du club. À partir de ce moment-là, il est véritablement devenu l’homme d’affaires que l’on connaît, celui qui vend la marque Pelé à toute personne intéressée. »
Auparavant, Pelé était aussi l’ambassadeur joueur-buteur de Santos qui monétisait d’interminables tournées intercontinentales qui lui permettaient aussi de faire tourner le compteur et de s’installer. un record de 1 283 représentations en fin de carrière. Son club (presque) éternel l’a également sauvé de la faillite au milieu des années 1960 lorsque son entraîneur espagnol José González Ozores, alias Pepe El Gordo, l’a poussé à investir dans une entreprise de matériel de construction.
L’entreprise Sanitaria Santista, aux fondations visiblement fragiles, va engloutir une bonne partie des économies de Pelé dans sa chute. En échange de ce sauvetage, l’icône a dû signer un nouveau contrat avec Santos, qui n’a pas été aussi avantageux qu’il aurait pu l’espérer compte tenu de son talent incommensurable avant de s’installer aux États-Unis.
« Il est allé chez Cosmos à New York parce qu’il avait essuyé une deuxième faillite avec des personnes malveillantes », explique Michel Raspaud, également maître de conférences à l’université Grenoble Alpes. De son exil américain la colombe devient gloutonne. Figure de géants comme MasterCard et Pepsi, de marques de luxe (Hublot, Vuitton) ou bien plus mainstream (Subway), parmi – de nombreux – autres sponsors, Pelé ne quittera plus le premier plan commercial jusqu’à sa mort. Après avoir changé le visage du football tout au long de sa carrière, il fait entrer le plus grand sport du monde dans l’ère du business.
« Comme un caméléon »
« Il était comme un caméléon », raconte le sociologue. Ils lui ont proposé du Viagra, il a fait du Viagra, ils lui ont proposé de la MasterCard, il a fait de la MasterCard sans distinction, à partir du moment où l’argent est rentré. Produit en 2002, le pub pour le médicament contre la dysfonction érectile fera parler de lui en ville et le malade, alors âgé d’une soixantaine d’années, se sentira obligé de déclarer qu’il n’y a jamais eu recours.
D’autres pépites se sont bonifiées avec le temps, comme cette publicité pour la console antédiluvienne Atari 2600 au début des années 1980, accompagnée du basketteur Kareem Abdul-Jabbar et du pilote automobile Mario Andretti. Et à propos de le one shot en France pour le Loto Sportif 1987, quand le King débarque dans un bar du PMU en tenue d’époque au milieu d’une clientèle en délire ?
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JE SUPPOSE
Débutant au bas de l’échelle sociale dans un pays fondamentalement inégalitaire, Pelé a tout fait pour que lui et sa famille nombreuse (trois épouses consécutives et sept enfants reconnus) ne manquent de rien, donnant même parfois l’impression de piller. « Ce n’était absolument pas une personne à vendre », assure Michel Raspaud, qui se souvient d’une anecdote de sa jeunesse. « En 1958 quand le Brésil a remporté sa première Coupe du mondechaque joueur a gagné une voiture. Pelé a donné le sien à son père. »
João Ramos do Nascimento, dit Dondinho, footballeur de talent dont la carrière a été brisée par une blessure qui a plongé sa famille dans la misère, n’a pas eu à faire face à un ingrat envers son fils prodige et prodigue. Le même qui disait dans la célèbre interview pour la deuxième chaîne française mentionnée au tout début de l’article : « Je pense que l’argent vient en dernier avec un score de 1 à 10. Mais faut-il toujours croire un roi ?